Théâtre ONYX
Avec Les Collectors
saison 1

Joël Kérouanton
ledicoduspectateur.net

Sommaire

4 Édito

5 Autour de : « (S)acre »

11 Autour de : « Via Kanana »

23 Autour de : « ASSIS »

33 Le mini-dico du spectateur — ONYX

44 Colophon

Édito

Saint-Herblain, 2017-2018
Cette saison, nous avons confié l’animation de nos coachings du spectateur à Joël Kérouanton, écrivain, poète et essayiste. Il a proposé des expériences collectives de spectateurs, en s’appuyant essentiellement sur Le Dico du spectateur, œuvre interactive sur la relation du public au spectacle vivant.

Ce livret propose une mise en récit de ces coachings et présente des définitions du spectateur rédigées à la suite de ces expériences. Ces définitions herblinoises ont rejoint le corpus complet du Dico du spectateur, œuvre de Joël Kérouanton, sur le site ledicoduspectateur.net.

L’équipe d’ONYX

Avec Les Collectors — saison 1

Saint-Herblain, 2017-2018

Cette saison, nous avons confié l’animation de nos coachings du spectateur à Joël Kérouanton, écrivain, poète et essayiste. Il a proposé des expériences collectives de spectateurs, en s’associant aux Collectors — une Brigade d’intervieweurs qui s’est chargée de collecter les avis des spectateurs.
La matière collectée a donné lieu à celivret, receuil de critiques collaboratives des spectacles qui alimentent désormais Le Dico du spectateur.

L’équipe d’ONYX


TOUTES LES EXPÉRIENCES AVEC LES COLLECTORS & ONYX
PRÉSENTATION DES COLLECTORS

Cet article est le récit d’une soirée « Bord de scène » menée au théâtre ONYX, rédigé sous la forme d’une critique journalistique.

Bord de scène est un jeu qui prend la forme d’une discussion d’après-spectacle, comme s’il venait d’avoir lieu. Le jeu construit collectivement la fiction d’un spectacle à venir. Les joueurs se divisent en journaliste, chorégraphe et danseurs et discutent du spectacle comme s’il avait déjà eu lieu, et en discute les pourquoi et les comment… Une des personnes présente est un joueur entrainé. Il amorce et met fin à la partie.
ENTRAÎNÉS OU NON, AUCUN DES JOUEURS PRÉSENTS N’AVAIENT VU LE SPECTACLE (S)ACRE.

Théâtre ONYX, le 17 novembre 2017

C’est à un moment rare — donc fort — que le public de Saint-Herblain a été convié hier soir. Rare, parce que David Drouard accepte peu ce genre d’exercice. Fort, parce qu’il a dû assumer seul la quasi-totalité de la rencontre : les musiciens couraient les bars de nuit « à la recherche d’amis nantais », et le jardinier Gilles Clément déambulait dans les espaces publics près d’IKEA « à la recherche de nouveaux tiers-paysages ».

La présence d’un jardin sur scène a amorcé le débat. On a retenu le projet du chorégraphe « d’inviter le paysage sur le plateau ». Son complice jardinier a appliqué sa notion de « tiers-paysage » à la danse, en déposant de la terre et des graines à même le plateau — inévitable référence au Sacre de Pina Bausch. Le jardin, en constante évolution au fil des tournées, n’a, de fait, jamais présenté le même terrain de jeu aux danseuses. Si, pour le chorégraphe, « les plantes s’organisent toujours pour ne pas mourir, en produisant des graines », les tournées ont pris fin avec la mort des plantes. « Le sacrifice des plantes plutôt que de la jeune vierge pour laisser advenir le printemps », a avancé le modérateur en verve. Quant au chorégraphe, il a confié avoir invité les danseurs à « cohabiter » et à « négocier » l’espace avec les plantes.

Face à cette musique de Stravinsky « qui nous met par terre », le chorégraphe a mis de côté la partition originelle pour faciliter la danse des interprètes, « beaucoup au sol » a dit quelqu’un du public. Sur les quinze danseuses, cinq se sont sacrifiées, les réseaux sociaux ont même propagé la rumeur de burn-out. « Peut-être ces burn-out sont-ils liés aux cris que les danseuses ont dû pousser, très organiques et très engageants de leur part ? » (dixit le même spectateur).

C’est la musique de (S)acre qui, au final, a emporté le moins d’adhésion. À propos de ce bruit qui s’agence en partition, un spectateur a confié à la fin de la rencontre : « Mettre des bruits de bruits d’une voiture qui ne démarre pas en caressant une racine d’arbre, ça m’est resté ».

La soirée a été émaillée par des tweets projetés en live. Un expert en réseaux sociaux, particulièrement en forme, a rendu compte de ces cuits-cuits du Web, notamment de la préfecture, préoccupée par un spectacle « qui fait l’apologie du paganisme (…) qui plus est dans un lieu public », d’un Manuel Valls méconnaissable qui, avant de déraper, est tombé sous le charme de la danseuse dans le rôle de l’Élue (« la grâce inéfable de sa corporéité nous emmène caresser le sublime du bout des doigts »), et de tonton Albert qui s’est demandé si oui ou non il y avait eu sacrifice à la fin et s’est posé la question de la signification dans la danse contemporaine « entre le suggéré et la crudité de la monstration de l’acte ». Le même sacrifice, moqué par Daech, qui « manquait franchement de réalisme ».

Une soirée tout en rondeur, pour le meilleur de la danse et de l’art, vivifiée par un public pas né de la dernière pluie.

Pour Le Dico du spectateur,
Joël Kérouanton


Expérience collective de spectateurs menée par Joël Kérouanton avec la complicité artistique de Catherine Musseau. En présence de Carine Cesbron (enseignante), Catherine Musseau (professeur de danse) et Louis Schickel (designer) et du public du théâtre ONYX.
Pour approfondir : Présentation de (S)acre par DADR compagnie.

Crédits Live Tweet  : Louis Schickel
Première mise en ligne le 3 janvier 2018 et dernière modification le 4 octobre 2019

Cet article est le récit d’une soirée « Main à la pâte  » menée au théâtre ONYX, rédigé sous la forme d’une critique journalistique.

Main à la pâte est un dispositif participatif dans lequel le spectateur est amené à mettre la main à la pâte et se représenter le spectacle à venir, à partir des matériaux proposés pouvant faire office de décors et de personnages. Chaque tentative est traduite en photographie, restituée sur place. En fin d’expérience, les spectateurs mettent en récit leur production.
ENTRAÎNÉS OU NON, AUCUN DES JOUEURS PRÉSENTS N’AVAIENT VU LE SPECTACLE (S)ACRE.

ONYX, le 19 décembre 2017.

« Il faut rire de tout », proposait Desproges. « C’est extrêmement important. C’est la seule façon humaine de friser la lucidité sans tomber dedans » (même quand il s’agit de la vénérable action culturelle et du travail en direction du public dans les arts du spectacle).

Donc, au théâtre ONYX, pour friser la lucidité de l’action culturelle, sans tomber dedans, le public est invité à prédire.

Raconter ce que l’on n’a pas vu, certains auteurs s’y sont déjà essayés, avec pas mal de réussite. Le plus fameux : un auteur américain, sept tomes sur l’État de l’Alabama, sans y être jamais allé, en Alabama. Mais les auteurs ne sont pas les seuls à évoluer dans la sphère prédictive. Nous avons tous fait l’expérience de la prédiction, par exemple avant un voyage en Espagne : les films de Pedro Almodóvar, la littérature de Gabriel García Márquez ou les simples récits de voyages en terre hispanique de nos proches sont, pour les primo-voyageurs, autant de matière à prédictabilité.

Ici, nous ne sommes ni en Alabama ni en Espagne. Nous sommes au théâtre ONYX, à Saint-Herblain, au centre de la plus grande zone commerciale de l’Ouest de la France. Ici, face à IKEA, Leclerc, Boulanger, Apple Store, Décatlon et compagnie, on coache le spectateur. En guise de coaching, on l’échauffe avant qu’il n’assiste au spectacle. On lui propose, par exemple, de scénographier son spectacle imaginaire dans une boîte à chaussures. Oh, bien sûr, ça ne se fait pas en deux coups de cuillère à pot ! On lui donne du grain à moudre, au spectateur. On commence par l’immerger dans une boucle sonore de Via Kanana. Quelque chose d’évocateur. Quelque chose comme ça. Une bande son qui invite à sortir ses mains du fonctionnel (manger, conduire, faire la vaisselle, passer la serpillière, se gratter le nez) pour faire appel à ses imaginaires à l’aide d’un bric-à-brac mis à sa disposition : glaise, pigment, colle, papier, bout de plastique, ficelle, bambous, crayons de couleurs, Playmobil, figurine en plâtre, agraffeuse, gouache, et boîte à chaussures.

Du son, du bric-à-brac, de l’espace clos, une heure devant soi et c’est parti mon kiki.

Les spectateurs pitrouilleront la glaise ou autres matières. Avec rien, ils feront.

Faire d’abord,
parler,
ensuite.

« Espace étendu. Ambiance lumineuse. Fluide. Grand déplacement des danseurs, plutôt en mode course, avec des tâches à faire en commun. Autour, des matériaux naturels, un coté nature symbolisé par la présence d’une vache. Devant cette scène, je m’imaginais plutôt en spectateur-immergé. »

« Quelque chose de très léger. Relaxant. Paysage Sec. Aride. Qui me fait penser à l’Afrique. Terre glaise, sable, fil rafiat, branche sèche. De l’eau, avec un petit peu d’encre bleu. Des personnages qui y font trempette. Comme une scène. Ils discutent. En face à face. Devant cette scène je m’imaginais plutôt en spectateur-passif [en apparence]. »

« J’avais l’idée d’un Playmobil pour représenter le lisse. Du lisse qui contraste avec la terre. Un aspect propre et un aspect sale. Les grandes villes internationales d’Afrique du Sud, avec des immeubles (que j’imagine chicos) côtoyant les quartiers des townships, où le bricolage règne en maître. Une scénographie ouverte sur l’infini du crépuscule, tel le théâtre de Bussang de Maurice Pottecher qui ouvre le mur du fond sur la montagne. »

Le plus étrange, dans cette blague de la prédiction, c’est la concentration aiguë des protagonistes. Nous sommes ici en présence d’experts de la haute précision.

Pour des amateurs, c’est pas mal. On ne voit pas forcément le résultat fini. Le truc peut être raté, on n’en a que faire : ce qui compte c’est la densité du moment, la grande précision que met chacun dans ses gestes. L’occasion, en peu de temps, de vivre l’urgence de la création et l’intensité que cela produit.

Et puis il y a la danse des mains. Des mains qui entremêlent les fils, les fils qui entremêlent les mains, les mains qui cherchent, les mains qui trouvent, les jeux de main jeux de vilain, les mains adroites, les mains gauches, les mains expertes, les mains tremblantes,
les mains à la pâte.

Pour Le Dico du spectateur,
Joël Kérouanton
À partir des paroles de spectateurs recueillies par Les Collectors


Dispositif participatif « Main à la pâte ». Avec : Joël Kérouanton - Catherine Musseau - Ollivier Moreels - Virginie Le Priol - Théa Terrien - les spectateurs de l’ONYX, Via Katlehong & Gregory Maqoma et les élèves de la classe Prépa, École des beaux arts de Nantes/Saint-Nazaire.

Crédits Photos : Ollivier Moreels & Théa Terrien
Mise en ligne 03 janv. 2018 et dernière modication 4 oct. 2019.

Dans le cadre du projet « DANSECRITURE »

Cet article est le récit d’une après-midi « Critique du spectateur » menée avec le théâtre ONYX et Les Collectors, rédigé sous la forme d’une critique journalistique autour du spectacle ASSIS


Théâtre ONYX, 27 janvier 2018.

C’est à un évènement peu commun que le théâtre ONYX nous a conviés, à la suite du spectacle ASSIS, chorégraphié par Cédric Cherdel. Le plus souvent brouhaha, les conversations des spectateurs ont pu trouver forme lors d’une collecte d’impressions, dans le hall du théâtre.

La réception s’est avérée plurielle et drôle. Nous avons entendu un spectateur résumer ASSIS par « des Biomen pastel, mis en ridicule par leur égo, leur fierté et leur rapport aux autres ; une esthétique année 1980, tendre et simesque à la fois ». Autre formule qui a marqué les esprits : « Une tribu de p’tit crados en pyjama assis. » Ou encore : « C’est l’histoire de cinq danseurs en pyjama qui se mettent peu à peu debout, au fur et à mesure que le jour se lève ».

Mais ASSIS s’est avéré avant tout l’histoire d’une communauté de gestes. Des gestes peu communs, puisque l’essentiel de l’expressivité se situait au niveau visage. Comme si chacun des visages dansait. Cette communauté apparaissait souvent, pour les spectateurs, un peu étrange, « parce qu’à la fois très différente et très proche de ce qu’on connaît » dira une femme, cheveux grisonnants et toute pimpante, troublée par cette intranquille étrangeté. « Étrange, parce qu’on n’a rien à voir avec eux, et en même temps, c’est nous ; d’autant que chaque personnage parle avec le public : avec une courbette, un signe de la main. Le danseur devient presque quelqu’un de la famille. C’est très Gallotta à ses débuts. »

La scénographie de ASSIS se présente sous forme d’un gigantesque tabouret de bar avec dossier. Avec ASSIS, même le sol est assis. Sa couleur blanc immaculé ne propose pas de limite entre le proche et le lointain, invitant le spectateur, dans une ambiance immersive, à se perdre dans une troisième dimension.

Perdu, le spectateur l’était parfois. Égaré « par cet effet de monotomie à certains moments. Impression de répétition et de longueur ». Quand ce n’était pas tout simplement de la colère, comme ce quadragénaire bardé de piercing : « Ah non, ils nous ont encore fait le coup des costumes en couleurs ! » Avec la sensation d’être devant un spectacle Benetton. Un autre spectateur, trentenaire décontracté, plus modéré dans sa critique, affirmait que les coloris des costumes n’étaient pas justes par rapport au teint de la peau, « d’autant que ce genre de costumes, ça glisse et c’est pas beau : ça fait effet pyjama ». Les costumes, sujet clivant de ASSIS ? Peut-être. Un ami du trentenaire a montré, quant à lui, son enthousiasme, voire son euphorie : « Les costumes de ASSIS ? C’est très frais, très printanier. Très Frères Jacques. Ce spectacle, c’est une orfèvrerie. Un bijou ». ASSIS, une pièce puissante, parce qu’ambigue, dans le sens où elle induit des interprétations multiples ?
Avec ce « portrait de l’éveil social de l’être aujourd’hui », ASSIS produit de la pensée en développant un propos autour de l’entraide, sous fond de rivalité naissante entre les êtres, jusqu’au dictat d’une personne et à l’épuisement des autres. « Tout le mde se pouse » (Tout le monde se pousse) écrira une enfant de sept ans, racontant ASSIS à sa façon, avant de conclure : « C’est un peu énervé comme spectacle ».
Des primates, à qui ne manque que la parole, le seraient à moins. Ces hommes-singes, qui font vœus de silence, s’essaient à faire mini-société, passant de la position dorsale (les quatre fers en l’air) à une position assise, semi-assise puis semi-debout.
ASSIS présente donc une évolution de l’homme au sens de Darwin, dans une forme humoristique, avec un plaisir évident à danser, sans toutefois tomber dans le performatif : « Sur scène, on est habitué à voir des performeurs. Mais dans ASSIS, la performance n’est pas sur le plan de la technicité (le grand écart, les grands sauts, les envols), la performance est dans l’art de la maladresse. L’aspect maladroit donne de l’humanité. Et de l’humour. » Un humour contagieux, puisqu’à la toute fin de cette collecte d’impressions, un spectateur s’est exclamé « Ah ben zut, y a que les spectateurs qui sont restés assis ! ».
« Comment transmettre maintenant cette pièce ? Est-ce que ASSIS peut devenir pièce de répertoire ? » Deux questions majeures posées par une professionnelle de la danse présente ce jour, emballée par la communauté d’interprètes que forment les danseurs, dans une « même corporoeité, un même imaginaire ». Deux questions qui, nous espérons, trouveront réponse prochainement, pour le plus grand plaisir des spectateurs herbelinois.

Pour Le Dico du spectateur,
Joël Kérouanton
À partir des paroles de spectateurs recueillies par Les Collectors


Crédits Photos : Théa Terrien - Mise en ligne 03 jan. 2018 et dernière modication 25 sept. 2019.

A
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A-temps-partiel

Le spectacle, ce n’est qu’un moment dans une journée. Tout, même le plus insignifiant élément de la vie quotidienne, peut impacter le regard : circulation routière, clin d’oeil coquin, bug informatique, nuit agitée, température de l’eau dans sa piscine préférée, digestion mal maîtrisée, alignement des astres peu favorable, SMS de sa belle-mère.


« (…) J’ai dormi vingt minutes, ce n’est pas à cause du spectacle : j’ai fait la fête hier soir. Mais j’ai bien aimé la fin (…). »
UN SPECTATEUR ANONYME DU XXIe SIÈCLE - COLLECTE D’IMPRESSIONS AUTOUR DE ASSIS
Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : menée lors d’une journée « Critique du spectateur » autour de ASSIS (Cédric Cherdel, association UNCANNY), 27 janvier 2017. Dans le cadre du projet Assis | DANSÉCRITURE.
Géolocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)

Aux-aguets

Quelque chose va arriver. L’élément phare du spectacle. Le spectateur-aux-aguets attend ce moment, les oreilles tendues, telle une biche. Le dos droit. Les jambes comme il faut. Le regard rivé sur scène. C’est un peu Où est Charlie ? Et soudain, il se dit : « Ça y est, c’est le moment ».

Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : Coaching du spectateur autour de Via Kanana / G. Maqoma - Via Katlehong, 19 décembre 2017
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)

Avec

En totale connexion. Ne décroche jamais. Se laisse remplir par les interprètes. Empathise avec. Dans le flux. Dans leur flux.


« (…) À aucun moment je n’ai quitté le plateau en raison de pensées qui m’envahissaient. Pour quelqu’un comme moi qui voit beaucoup de danse, c’est rare. Je suis souvent dans le jugement, je peux être très radicale quand ça me déplaît. Je peux me couper de la proposition. Donc c’est rare d’être tout le temps avec. Dans le flux du spectacle. En cela, j’ai apprécié. J’étais en intelligence avec la proposition. Je me suis surprise à sourire (…) »
NATHALIE, COLLECTE D’IMPRESSIONS AUTOUR DE ASSIS
Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : menée lors d’une journée « Critique du spectateur » autour de ASSIS (Cédric Cherdel, association UNCANNY), 27 janvier 2017. Dans le cadre du projet Assis | DANSÉCRITURE.
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)
D

Du-Sacre

Le Sacre ? C’est se confronter à la mort en direct. Ça a beau faire partie du pa-tri-moi-ne de la danse, faut être en forme.


« Jamais de ma vie je n’oublierai le premier filage du Sacre. Jusqu’alors Pina avait répété le solo de « L’Élue » à part – dans son bureau. Aucun d’entre nous ne pressentait de quelle façon “L’Élue” allait danser pour mourir. À l’époque c’était Marlies. La chorégraphie se déroulait, nous étions tous en sueur, à bout de souffle, l’espace entier tremblait et nous étions là à regarder Marlies lutter contre la mort. Incroyable, j’avais du mal à regarder tellement c’était effrayant. Je me disais, elle va vraiment mourir. Je devais passer seule sur le devant de la scène. J’avais les pieds comme du plomb. Le regard rivé sur Marlies. À la fin, elle tombait, elle était morte. Qui sait si elle n’était pas vraiment morte ? Je n’ai pas pu le supporter, je suis sortie de scène en courant et en pleurant, tellement c’était inouï. »
ENDICOTT (Jo Ann), Le sacre du printemps, L’Arche, 2012.

« (…) Public : Moi je me suis demandé si la tournée de (S)acre ne s’arrêterait pas qu’avec la mort des plantes [plantées et scénographiées par Gilles Clément].
Modérateur : Le sacrifice des plantes plutôt que de la jeune vierge pour laisser advenir le printemps ?
Chorégraphe : Oui, mais les plantes s’organisent toujours pour ne pas mourir, puisqu’elles produisent des graines. Une plante en souffrance va tout de suite produire des graines pour pouvoir se reproduire. (…) »
COACHING DU SPECTATEUR AUTOUR DE (S)ACRE
Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : Coaching du spectateur autour de (S)acre / David Drouard, ONYX., 17 novembre 2017
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)
I

Immergé

Son truc ? Sa drogue ? Son kif ? Être absorbé totalement par la pièce. Jusqu’à faire corps avec les interprètes et la scénographie. Dans une immersion joyeuse. Presque festive. Cela suppose être devant. Ou rien.

Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : Coaching du spectateur autour de Via Kanana / G. Maqoma - Via Katlehong, 19 décembre 2017
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)
N
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Néo-Spectateur

En danse contemporaine, il faut bien une première fois. La toute toute première fois. Une première fois pétrie de premières fois avec ses premières questions de première main : « Pourquoi y a pas une histoire ? », « Qu’est-ce qu’ils racontent ? », « À quoi ça sert ? » Parfois, le choc est si important qu’il conduit au mutisme.


« Au théâtre ONYX, à Saint-Herblain, nous avons rencontré un papa avec sa fille. Ce qui était assez étonnant, c’était de voir la tête de la petite fille… l’impression qu’elle était punie. Elle a trouvé la danse très ennuyeuse, et le papa, tout jouasse d’avoir assisté à un si beau spectacle, a passé du temps à justifier pourquoi la pièce était ennuyeuse pour sa fille, en disant qu’elle ne voyait que des pièces de danse classique avec l’école. C’était la première fois qu’elle allait voir un spectacle de danse contemporaine. »
— Virginie, Céline - Collectrices d’impressions autour de ASSIS
Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : menée lors d’une journée « Critique du spectateur » autour de ASSIS (Cédric Cherdel, association UNCANNY), 27 janvier 2017. Dans le cadre du projet Assis | DANSÉCRITURE.
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)
P

Passif (en apparence)

L’ouie entend tout (oreilles tendues). Le regard englobe tout (yeux fixes). L’odorat odore tout (narines grande ouvertes). Le toucher touche tout (paumes de mains orientées vers le paradis). Le spectateur-passif a le corps en alerte maximum.

Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : Coaching du spectateur autour de Via Kanana / G. Maqoma - Via Katlehong, 19 décembre 2017
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)

Penseur

En présence d’un bon spectacle, ne pense pas. Est à 100 % avec les interprètes. Les entend. Les sent. Inversement, quand le spectacle n’est pas bon, la machine à penser s’emballe, les ritournelles questions de filiations apparaissent, et le syndrome du « pourquoi ci, pourquoi ça » refait surface. Résultat des courses ? Quand le spectateur commence à penser pendant le spectacle, c’est mauvais signe pour le spectacle.


« (…) Je ne pense pas quand je suis en situation de spectatrice. Je suis juste là, avec ce qui se passe. C’est pas souvent. Ces derniers temps, c’est pas souvent que je ne pense pas. Sauf quand je regarde les pièces d’Emmanuelle Huynh.
SPECTATRICE ANONYME DU XXIème SIÈCLE.
Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : Coaching du spectateur autour de Via Kanana / G. Maqoma - Via Katlehong, 19 décembre 2017
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)
Q

Qu’est-ce-que-tu-deviens

Le spectacle, l’occasion de voir ses amis et ses connaissances ? Assurément. De blablater ? Certainement. D’échanger à propos de la scène ? Peut-être.


« (…) Les spectateurs aiment parler d’eux, entre eux. Les connivences priment sur la connaissance. Les questions “Qu’est ce que tu deviens ?” et “C’est quoi ton prochain projet ?” priment sur “qu’est ce que tu as vu ?”.
MUSSEAU (Catherine) - COLLECTRICE D’IMPRESSIONS AUTOUR DE ASSIS
Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : menée lors d’une journée « Critique du spectateur » autour de ASSIS (Cédric Cherdel, association UNCANNY), 27 janvier 2017. Dans le cadre du projet Assis | DANSÉCRITURE.
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)
R

Référence

Qui dit art dit : ré-fé-ren-ce.
Spectateur, c’est donc :
1) chercher les références à l’histoire de l’art (et, bien sûr, en trouver peu).
2) puiser dans ses propres références (elles sont pléthoriques et pas toujours « comme il faut »).
Bref, spectater, c’est accepter une position bancale.
Et s’y tenir.


« (…) Ce qui se passe sur scène est souvent impossible à raconter. Du coup, j’aime passer par des références cinématographiques. Comme pour le spectacle ASSIS, de Cédric Cherdel : la façon qu’avaient les danseurs de se dandiner et de courir, ça me faisait penser à Didier, le film d’Alain Chabat (…). »
UN SPECTATEUR ANONYME DU XXIe SIÈCLE - COLLECTE D’IMPRESSIONS AUTOUR DE ASSIS
Expérience : théâtre ONYX — 1
Collecte : menée lors d’une journée « Critique du spectateur » autour de ASSIS (Cédric Cherdel, association UNCANNY), 27 janvier 2017. Dans le cadre du projet Assis | DANSÉCRITURE.
Géocalisation : ONYX-La Carrière, Saint-Herblain (France)

Colophon

Présentation des coachings par le théâtre ONYX

Design graphique : atelier g.u.i.
Lecture-correction : Solène Bouton
Direction éditoriale : Gaëlle Lecareux, Jean-Noël Charpentier et Joël Kérouanton