La pièce est là

La Briqueterie, Vitry-sur-Seine, 10 septembre 2020, 17h20.



Je le pressentais, que la pièce allait être belle. À La Briqueterie, à quelques jours de la première, la mayonnaise a pris. Claire, puissante, drôle : la pièce était là. Et moi, seul spectateur de cet avènement, je n’ai su qu’applaudir fort et crier Bravo !! Bravo !! Bravo !! Pas pu en dire davantage que « c’était bien », « c’était vraiment bien » et de constater que mon propos faisait un peu flop. Le chorégraphe et les danseurs étaient surpris : ils avaient tant de choses à affiner d’ici à la première qu’ils ne pouvaient pas s’enthousiasmer. J’avais envie de leur dire, aux artistes : la pièce est faite ! Voilà, ça y est ! Mais non. Ils ne voulaient pas trop entendre cela, tant les raccords étaient encore nombreux à peaufiner entre les séances. Et puis il y avait les costumes (une pièce de crochet à poser sur chacun des vêtements), les tombées de neige (des tops à préciser), la musique (des rajouts à faire, impossibles à réaliser tant que la chorégraphie n’est pas fixée). La to do list était longue et contrastait avec mon état joyeux, presque flottant, comme si j’avais bu. Voilà, c’était ça : la pièce produisait chez moi une légère ivresse, la plus belle, celle qui fait décoller le corps sans alourdir la tête, celle qui provoque le sourire permanent et l’envie de danser. La transedanse de MASCARADE, par sa contagiosité joyeuse, provoquait la transedanse du seul spectateur en présence que j’étais. Enfin, une transedanse mentale face à la transedanse du plateau. Et je trouvais que les transedanseurs, en fin de pièce, n’avaient pas terminé leur job. Je les aurais bien vus sauter dans la fosse et poursuivre leur geste avec le spectateur, tournoyer de concert jusqu’au bout de la nuit.